En 2023, la SPA et ses refuges ont accueilli près de 45 000 animaux abandonnés ou maltraités (dont 28 652 chats et 13 124 chiens), un bien triste record conduisant à une saturation des refuges sur l’année complète.

L’association est claire. Nombreux sont les abandons qui “auraient pu être évités grâce à une adoption plus réfléchie”. Parmi eux, l’abandon des chiens et chats de race à la mode.

En cause ? Une impréparation mais pas seulement. Les mutations génétiques provoquées pour “parfaire” certaines races engendrent problèmes de santé et souffrances pour l’animal ainsi qu’un profond désarroi chez le maître qui ne sait comment aider son compagnon.

Voyons les différents problèmes que soulève la recherche de standards physiques inatteignables chez les animaux ainsi que les pistes à explorer pour bâtir une société qui fait primer le bien-être de nos amis à fourrure avant tout.

Gros plan sur un staffie roux et blanc en laisse

Hypertype et races : c’est quoi le problème exactement ?

Chez certaines races de chiens et chats, les traits “caractéristiques” sont accentués au fil des ans par une sur-intervention humaine lors de la reproduction. Ces traits tels que des yeux globuleux, une face écrasée ou de nombreux plis sont appelés hypertype.

Parce qu’ils font dévier la race de sa constitution initiale, ils causent divers problèmes de santé, parfois graves voire létaux, mais également des problèmes de comportement (saviez-vous par exemple que la mastication du chien est un besoin naturel ?).

Cette réalité conduit souvent à des abandons, les propriétaires découvrant au bout de quelques semaines, mois ou années qu’ils ne peuvent répondre aux besoins spécifiques de leur compagnon.

En souhaitant adopter une race spécifique pour son apparence (et trop souvent sa popularité), certains maîtres sous-estiment les soins et/ou le temps nécessaires à leurs pathologies ainsi que les frais inhérents aux problèmes de santé liés à l’hypertype et à leur éducation.

C’est pour cela que chez Hariet & Rosie, nous avons toujours soutenu l’adoption responsable car un “achat”, c’est une chance de moins pour un animal en refuge et moins de fonds pour des associations qui oeuvrent au quotidien à apporter un peu de lumière et d’espoirs à leurs pensionnaires.

Faire le choix d’un chien ou chat de race, c’est aussi contribuer malgré soi à un “effet de mode” et à la pérennité des réseaux de trafic, allant du vol d’animaux dans les jardins à la reproduction forcée et répétée des femelles, diminuant considérablement leur espérance de vie.

Si vous habitez en Loire-Atlantique, voici une liste d’organismes responsables pour l’adoption d’un chat ou d’un chien à Nantes.

Problèmes de santé et traits comportementaux conduisant à l’abandon chez certaines races de chiens

Parmi les races de chiens concernées par des problèmes de santé ou de comportement liés à une sélection génétique et souvent abandonnées, nous retrouvons entre autres :

  • Les races dites “brachycéphales” : ces chiens au nez court et à la face écrasée (bouledogues, boxers, shih-tzu…) souffrent de multiples problèmes de santé, les plus connus étant les difficultés respiratoires dues à des voies écrasées et accentuées lors des épisodes de fortes chaleurs. Les changements morphologiques sont tels chez le bouledogue anglais qu’il ne peut aujourd’hui plus se reproduire sans intervention humaine (on ne vous fait pas de dessin). Certaines chiennes bouledogue français ne peuvent, quant à elle, pas mettre bas sans césarienne tant les chiots ont grossi
  • Le cavalier King Charles spaniel : cette race est connue pour souffrir de syringomyélie, une maladie neurologique causée par la malformation de sa boîte crânienne pouvant provoquer des douleurs chroniques invalidantes. On estime qu’un cavalier sur deux est concerné
  • Le bull terrier : très reconnaissable avec son front courbé, le bull terrier souffre fréquemment de problèmes de la mâchoire et de maladies cardiaques héréditaires
  • Le berger allemand : la sélection génétique opérée pour obtenir certaines caractéristiques anatomiques (abaissement de l’arrière-train notamment) a augmenté les prédispositions à la dysplasie de la hanche (malformation de l’articulation conduisant à une usure prématurée du cartilage), avec des conséquences accrues chez les chiens de travail
  • Le shar-pei : parce qu’il est pourvu de nombreux plis, le Shar-Pei est naturellement exposé à différents problèmes de peau (irritations, infections, parasites…). Comme pour le Chow-Chow par exemple, il est aussi concerné par l’entropion, un retournement des paupières vers l’intérieur

Le carlin : probablement la race qui a connu le changement le plus spectaculaire en deux siècles. En plus de problèmes respiratoires et de risques d’évanouissement, le carlin souffre régulièrement d'affections oculaires dues à ses yeux proéminents et qui nécessitent une surveillance régulière

À gauche, un carlin dans une peinture de 1802, à droite un carlin contemporain

À gauche, un carlin dans une peinture de 1802, à droite un carlin contemporain

 

  • Le malinois et le berger australien : ces chiens intelligents et énergiques sont plébiscités pour leur apparence et leur constitution athlétique. Mais ils requièrent beaucoup d’exercice et de stimulation mentale, ce que de nombreux maîtres inexpérimentés ne parviennent pas à leur apporter. Ils font aujourd’hui partie des races les plus abandonnées
  • Le husky sibérien : très à la mode du fait de son apparence de loup apprivoisé, le husky est un chien exigeant qui a besoin de grands espaces et d’un encadrement strict. Ses instincts de chasse sont souvent source de problèmes pour les personnes mal préparées
  • L’amstaff, staffy et american bully : ces “molossoïdes” remplissent les box des refuges chaque semaine. Parce qu’ils sont dotés d’une force remarquable, leur éducation est à ne pas prendre à la légère. Leur réputation non fondée de chiens dangereux (couplée à un manque ou une absence de bases éducatives) les expose par ailleurs à la double peine une fois au refuge avec des individus qui restent des années voire toute une vie sans trouver d’adoptant
  • Le jack russel : ce chien prisé pour sa petite taille et sa frimousse espiègle peuple les refuges. En cause : son instinct de chasseur nécessitant un environnement très dynamique et une grande disponibilité du maître
  • Le dalmatien : si la mode est retombée, la race jouit toujours d’une certaine popularité, faisant que les abandons ne sont pas rares. Mais le dalmatien se distingue d’autres chiens par sa constitution peu adaptée à la vie en extérieur et qui constitue pour lui une souffrance supplémentaire une fois en refuge

Problèmes de santé et traits comportementaux conduisant à l’abandon chez certaines races de chats

Malheureusement, les chats ne résistent pas non plus aux phénomènes de mode et aux abandons du fait de certains problèmes de santé, de caractéristiques comportementales ou tout simplement… De l’entretien. Parmi les races les plus concernées, on compte :

  • Le persan : comme les bouledogues, les persans sont brachycéphales et donc exposés à des problèmes respiratoires et des troubles oculaires, notamment des larmoiements excessifs et des ulcères cornéens
  • Le scottish fold : la mutation génétique responsable entre autres de ses oreilles repliées entraîne souvent une ostéochondrodysplasie, une maladie osseuse douloureuse qui affecte la mobilité
  • Le sphynx : parce qu’il ne possède presque pas de fourrure, il est particulièrement exposé aux sensibilités cutanées et aux dermatites. Ces besoins de soins très réguliers sont souvent mal anticipés par les adoptants, conduisant à des abandons
  • Le manx : le patrimoine génétique du chat de l’île de Man ne cause pas qu’une absence de queue mais aussi une malformation de la colonne vertébrale pouvant générer des douleurs et des difficultés à grimper
  • Le maine coon : ce chat imposant est souvent choisi pour sa beauté, mais son entretien est exigeant, notamment en termes de toilettage. Très affectueux, il demande aussi une attention particulière. Une situation d’isolement nuit donc rapidement à son bien-être, entraînant des comportements non désirés. Notons qu’il est aussi concerné par la cardiomyopathie hypertrophique féline et la dysplasie des hanche du fait de la sélection génétique
  • Le bengal : cette race séduit par son apparence sauvage. Toutefois, le bengal est un chat très actif et qui a besoin de stimulation mentale intense. En appartement, il peut se montrer destructeur et vocal si l’environnement ne lui est pas favorable (découvrez comment occuper un chat d’appartement dans notre guide dédié)
À gauche, chat persan gris à museau court de profil, à droite chat persan roux à museau écrasé de profil

Chat persan gris à museau court et chat persan roux à face écrasée

Élevage et sélection génétique : les pays qui ont déjà pris des mesures

Face aux abandons et aux questions de bien-être animal soulevées par le patrimoine génétique de certaines races, plusieurs pays ont déjà mis en place des restrictions ou interdictions à l’élevage. C’est le cas notamment :

  • Aux Pays-Bas : le pays a pris des mesures strictes contre l'élevage de races brachycéphales avec, en 2019, l’interdiction de l’élevage de chiens à museau court (dont le museau est inférieur à la moitié du crâne). Parce que le commerce illégal perdure, le pays réfléchit même à une interdiction de possession totale sur le territoire
  • En Norvège : le pays scandinave a décidé en 2022 d’interdire l’élevage du cavalier king charles spaniel et du bulldog anglais du fait des problèmes de santé récurrents de ses races et accentués par la consanguinité
  • Au Royaume-Uni : bien que l’élevage ne soit pas complètement interdit, le Royaume-Uni sensibilise de plus en plus à la sélection de chiens et de chats brachycéphales. Des campagnes visent ainsi les élevages irresponsables qui privilégient les caractéristiques esthétiques au détriment de la santé
  • En Flandre : depuis 2021, l’élevage et la vente des scottish folds sont interdits dans toute la région

Comment limiter durablement les abandons de chiens et de chats de race ?

Différentes mesures, des plus souples aux plus contraignantes, pourraient être mises en place en France pour permettre de diminuer très notablement les abandons d’animaux de race. On pourrait ainsi imaginer :

  • Sensibiliser davantage les futurs maîtres en organisant des campagnes gouvernementales informant sur les besoins spécifiques à certaines races
  • Rendre obligatoire les sessions d’information dans les élevages et les clubs canins pour présenter les caractéristiques des races et aider les familles à choisir un compagnon adapté à leur mode de vie 
  • Imposer aux éleveurs de pratiquer des tests de santé pour limiter la reproduction d’animaux porteurs de maladies héréditaires
  • Généraliser le suivi post-adoption en accompagnant les nouveaux maîtres dans les premières semaines, souvent cruciales, et fournir des cours d’éducation canine pour les races actives et intelligentes comme le malinois (dans l’immédiat, vous pouvez parcourir notre guide sur le puppy blues avec différentes solutions pour en sortir 💪🏻)
  • Intensifier les contrôles du délai de réflexion de sept jours imposé par la loi et encore non respecté par certaines animaleries (nous vous renvoyons à cette enquête de France 2)
  • Encadrer l’élevage de races à risques en limitant par exemple les portées d’animaux brachycéphales ou atteints de maladies génétiques, voire interdire l’élevage de certaines races
  • Favoriser l’adoption en refuge en sensibilisant les familles à l’adoption de races abandonnées plutôt qu’à l’achat de races populaires
  • Encourager les influenceurs, artistes et médias à faire preuve de responsabilité dans leur communication en ne promouvant pas l’achat de race de chiens ou de chats comme un style de vie